Noël est sauvé. Soit. Tout le monde s’en réjouira, tant nous manquent les tables, les fêtes, les rires, les gens, présents, proches. Mais voici le Nouvel An sacrifié sur l’autel de la lutte anti-Covid ! Le 1er janvier sera-t-il triste, voire désespéré ? On peut voir dans cette interdiction de réveillon un symbole à deux faces. Janvier a reçu son nom de Janus, le dieu à deux faces. Le message de ce Nouvel An escamoté peut-être négatif : l’année que nous venons de passer a été si difficile, exténuante pour bon nombre d’entre nous, notre santé a chancelé et nous avons perdu des proches. Alors comment imaginer, le virus encore présent, voire plus actif encore, comme chez nos voisins allemands, une année 2021 joyeusement ? L’État interdit symboliquement toute manifestation d’espérance en une année meilleure… Mais, dira-t-on, c’est pour notre bien. Pas sûr que les psychologues, débordés en ce moment, soient de cet avis. Voilà pour la mauvaise face de Janus, qui jette un regard attristé sur la bientôt défunte année 2020.
L’autre face regarde, malgré tout, vers la nouvelle année. Et que voit-elle ? La perspective d’un retour de la vie, grouillante d’étudiants, foisonnante de paroles et de débats, débordante de découvertes scientifiques et de brevets déposés. Nous avons tenu en 2020, non sans douleur. Nous avons assuré, autant que faire se pouvait, les cours, une pédagogie de campagne, numérique, déployée à grands moyens. La recherche s’est poursuivie, plus que jamais nécessaire, et pas seulement pour trouver un vaccin. Les services de notre université, convertis, par nécessité plus que par raison, au télétravail, ont tenu bon et assuré le fonctionnement quotidien de notre grande maison. Nous avons été solidaires pour venir au secours des précarités numérique, sociale, affective. Nous avons tenu. Certes, nous sortons de 2020 épuisés, mais debout. Plus fatigués que d’autres fins d’année, mais plus que jamais déterminés à relever le défi de la réussite de tous et pour tous, dès les premiers jours de la nouvelle année. 2021, nous laisse-t-on penser et espérer, sera l’année vaccinale. Tout le monde attend la fin du règne de la Covid-19.
Au terme de cette année si particulière, je veux vous dire, personnels et étudiants, mon infinie gratitude pour l’effort considérable que vous avez consenti pour faire vivre notre université. Mon admiration aussi, pour tant d’engagement de votre part. Janus a sauvé Rome de l’envahisseur en faisant couler une source chaude et pour le remercier, le Sénat romain décida de toujours laisser les portes de la ville ouvertes. Alors qu’elles s’ouvrent, les portes de notre université, dès janvier, pour ne plus se refermer. Et cela se passera en janvier 2021 !
Michel Deneken
Président de l'Université de Strasbourg